Eclairage sur le RPC post partum 2015

LE COLLÈGE NATIONAL DES SAGES-FEMMES DE FRANCE (CNSF)

COMMENTE LES RECOMMANDATIONS POUR LA PRATIQUE CLINIQUE SUR

LE POST-PARTUM PRÉSENTÉ PAR LE COLLÈGE NATIONAL DES

GYNÉCOLOGUES OBSTÉTRICIENS FRANÇAIS (CNGOF)

 – Lettre aux sages-femmes –

  • Le post-partum réhabilité

  • Quelle interprétation des recommandations ?

  • Rôles et compétences des sages-femmes

Le CNSF tient à vous apporter ces précisions en complément du communiqué de presse que nous envoyons aux médias. Ces commentaires vous permettront d’avoir des arguments au sein de vos services et de vos réseaux si cela s’avérait nécessaire. Le CNSF se tient à votre disposition par l’intermédiaire de sa Commission Scientifique et de sa Commission Exercice Professionnel pour toutes questions complémentaires.

  • Le post-partum réhabilité

Le Collège National des Sages-Femmes de France se félicite de la parution des recommandations portées par le Collège National des Gynécologues-Obstétriciens Français (CNGOF) auxquelles nous avons participé concernant le post-partum, insuffisamment étudié en Obstétrique. Elles permettront d’enrichir et éclairer nos pratiques professionnelles sur une thématique qui s’appuyait parfois sur des transmissions empiriques. Le CNSF souhaite cependant commenter ces RPC et préciser certains points.

  • Quelle interprétation des recommandations ?

Il est important de bien comprendre la formulation des recommandations :

  • « Il est recommandé de faire… » signifie que la littérature a démontré que faire ce geste a diminué des risques identifiés ; il faut donc faire ce geste dans la mesure du possible ;

  • « Il n’est pas recommandé de faire… » signifie que la littérature n’a pas démontré que faire ce geste a diminué des risques identifiés ; il n’est donc pas nécessaire de faire ce geste systématiquement. Mais il n’est pas interdit de le faire.

  • « Il est recommandé de ne pas faire… » signifie que la littérature a démontré que faire ce geste augmente des risques identifiés ; il faut donc éviter de faire ce geste.

De nombreux points ont fait l’objet d’un faible niveau de preuve (NP4 ou accord professionnel) : c’est-à-dire que les études retrouvées sur ces questions présentent des faibles niveaux de preuve et ne permettent pas de conclure avec certitude. Nombre de ces données proviennent de la littérature étrangère démontrant le retard pris par notre pays quant à ces questions ; ce que nous regrettons.

C’est pourquoi il est important de rappeler notre soutien à la recherche en maïeutique. Nous souhaitons que les sages-femmes puissent être incitées et aidées à investir ces thématiques en tant que chercheur(euse)s, comme dans d’autres domaines en obstétrique, comme par exemple la gestion du bas risque obstétrical. Ainsi, le CNSF, en tant que société savante, réaffirme son soutien actif auprès des sages-femmes françaises pour leur engagement dans la recherche. Cet engagement est encore trop souvent individuel et isolé, en proie aux difficultés de financement. Pour mémoire, c’était une revendication forte et unanime de la profession lors du mouvement de grève de 2013 – 2014.

Un exemple de l’insuffisance des recherches : RPC et rééducation périnéale

Un exemple particulier relève notre attention : la rééducation périnéale. En cas de symptomatologie, elle démontre son efficacité. En revanche, le manque de données probantes amène à conclure que celle-ci n’est pas recommandée chez des femmes asymptomatiques dans le but de prévenir une incontinence urinaire à moyen ou long terme (accord professionnel), ni pour prévenir les troubles de la statique pelvienne ou dans le traitement des dyspareunies (grade C).

Il pourrait donc être dommageable que l’absence de recherche conduise à diminuer la réalisation de ces séances en post-partum. Nous soulignons que les protocoles d’étude retrouvés dans la littérature internationale sont souvent bien éloignés des protocoles français (rythmicité des séances [souvent mensuelles], modalités des séances [individuelles ou en groupe], présence ou non d’un thérapeute, stratégie thérapeutique).

Aussi, même si l’intérêt de la rééducation dans le post-partum immédiat n’a pas pu être mis en évidence par l’analyse de la littérature internationale, il nous semble très probable qu’une éducation périnéale pour protéger son périnée tout au long de sa vie (y compris chez les nullipares) soit bénéfique. Il est donc nécessaire pour ne pas dire primordial d’évaluer nos pratiques françaises. A notre connaissance, une seule étude multicentrique française randomisée est actuellement en cours.

Ces séances permettent également aux sages-femmes rééducatrices de dépister d’éventuelles difficultés maternelles à l’origine des troubles psychiques du post-partum. Elles peuvent alors assurer l’accompagnement spécifique dans la continuité du suivi de grossesse, de la surveillance du travail et de l’accouchement, et de ses suites. Ces séances deviennent alors un temps d’’orientation, si nécessaire, vers une prise en charge adaptée.

 

  • Rôle et compétences des sages-femmes

Au cours de sa participation à la rédaction de ces recommandations, le CNSF s’est attaché à traduire la transposition de la réalité des pratiques et des rôles tenus par les sages-femmes dans les établissements de santé ou en exercice de ville. Le CNSF a veillé à ce que les sages-femmes soient bien reconnues au sein de « l’équipe médicale » ; y compris dans les situations ne relevant pas directement de leur responsabilité comme au décours d’une césarienne. En pratique, nous assurons fréquemment en lieu et place des médecins la surveillance clinique des césariennes en post-partum immédiat qui est légalement sous la responsabilité du gynécologue obstétricien qui a réalisé l’intervention. Cette responsabilité se prolonge au cours du séjour en maternité. Les sages-femmes poursuivent la prise en charge lors du retour à domicile. De même, lors d’une hémorragie de la délivrance, nous collaborons activement à la prise en charge dirigée par les médecins gynécologues obstétriciens et les anesthésistes. Nous pouvons même assurer un certain nombre de gestes d’urgence légalement autorisés dans le Code de Santé Publique (et notamment dans notre Code de Déontologie).

La rédaction finale de ces recommandations permet de cibler les actes à réaliser (ou à ne pas réaliser) et non qui doit ou devrait les réaliser.

Le CNGOF a reconnu, il y a quelques jours, au cours d’une conférence de presse, ces rôles tout en ne souhaitant pas que ces actes fassent l’objet d’une reconnaissance en termes de cotations pour les sages-femmes. Les sages-femmes peuvent donc assurer ces actes… Mais gratuitement ! Cela n’est évidemment pas acceptable pour le CNSF. Nous espérons que l’exigence scientifique, et le professionnalisme de nos confrères gynécologues passeront au-dessus de toute politique corporatiste. Nous appuierons évidemment nos syndicats professionnels dans leur démarche pour faire valoir et reconnaître ces actes.